jeudi 17 janvier 2008

On est proche de l'explosion (les antibiotiques du piratage)


Internet est une réalité et on ne peut plus, actuellement, le supprimer ni le contrôler à 100%. Pourtant on assiste depuis quelques temps à des réactions étonnantes de la part des maisons de disques, sociétés privées, gouvernements et autres instances puissantes et dirigeantes.

Personne n’est préparé à affronter le web et les technologies de l’information ; personne n’a les moyens et surtout les compétences pour intervenir sur l’irrémédiable évolution du monde des médias, au sens large. Mais dans cette cacophonie apparemment anarchique, certains pensent pouvoir faire la loi. Mais quelle loi ? La loi d’un pays, voire d’un continent, alors que l’outil est mondial, donc supra-frontalier ? Qui sont ces zorros de l’ère moderne, ces Don Quichottes d'un combat perdu d’avance ? Ils ont plusieurs noms et plusieurs apparences, mais ils ont en commun une infinie naïveté face à ce qu’ils pensent être un problème : les hackers et pirates de bas étages qui les empêchent d’amasser en rond.

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Soyons, pendant un instant, manichéen :

Pirater une œuvre au lieu de l’acquérir : c’est mal.

Télécharger un film ou un morceau de musique pour s’enrichir en le revendant illégalement : c’est très mal.

Produire et mettre en vente des CD audio que l’on ne peut pas écouter sur son ordinateur ou sur son autoradio : c’est mal. Quand on achète un lecteur de CD audio il est implicitement admis que l’on peut écouter des CD audio avec.

Produire et mettre en vente des CD audio qui installent des logiciels potentiellement malveillants sur un ordinateur : c’est très mal. Surtout quand on le fait en amateur et que cela peut anéantir un PC. Sony l’a appris à ses dépends en perdant non seulement un procès sur le sujet, mais surtout en perdant beaucoup de sa crédibilité envers les clients et les artistes, également trompés dans l’histoire.

Ennuyer 99% d’honnêtes gens avec des mesures dépassées et contreproductives destinées, à l’origine, aux contrevenants : c’est non seulement très mal, mais c’est surtout un aveu d’incompétence et d’impuissance.

Ne pas prendre en compte que la diffusion de musique ou de vidéos sur internet favorise également la vente légale d’œuvres qui, sans cela, ne seraient ni connues, ni achetées : c’est mal.

Acheter un CD ou un DVD et pouvoir en faire une copie pour usage privé, c’est bien. C’est surtout pratique, par exemple, si on endommage l’original ; pourquoi payer une seconde fois ce que l’on a déjà acheté et que l’on utilise à un exemplaire.

Pouvoir acheter des CD ou DVD en toute légalité, dans un magasin, sans l’arsenal des tracasseries, avertissements et menaces anti-piratage, anti-copie, anti-« tout ce qui concerne une personne sur mille », c’est bien.

Penser pouvoir anéantir les hackers et les réseaux p2p en édictant des lois ou en prenant des mesures coercitives, n’est ni bien ni mal. C’est purement et simplement absurde et irréaliste.

A trop considérer les gens honnêtes comme des criminels, à trop les traiter comme des pirates potentiels, à trop leur pourrir la vie à coup de mesures qu’ils ne méritent pas sous prétexte qu’on est incapable de les appliquer aux vrais pirates, il ne faudra pas s’étonner que ces honnêtes citoyens se mettent un jour réellement hors la loi (voir article : Média/Avertissements déplacés).

L’informatique nous a pourtant déjà donné un avant-goût de cette dérive. Lorsque Windows XP est sorti, avec tous les problèmes liés à l’activation du produit, beaucoup d’entreprises ont préféré opter pour un comportement étrange. Elles ont acheté toutes les licences pour Windows XP, mais ont installé uniquement des versions pirates dépourvues de validation. Est-ce légal ? N’est-ce pas légal ? Microsoft n’est pas lésé puisqu’elles ont payé toutes les licences utilisées. Voilà ce qui nous attend avec les autres médias, à force de se moquer des clients. Veut-on vraiment d’un monde pourri par tant d’absurdités ?

Si on transposait ces manières de faire aux véhicules, nous aurions des voitures avec une dizaine de serrures, à ouvrir dans un ordre donné, avec un avertissement vocal et une temporisation à chaque étape. L’avertissement mettrait en garde contre l’utilisation abusive du véhicule d’autrui. Avant de pouvoir mettre le moteur en route, il faudrait téléphoner à un opérateur, donner un mot de passe, attendre la validation sous forme d’un second mot de passe à introduire sur le clavier de l’autoradio. Tout ceci à cause d’un ou deux individus qui forçaient les serrures des voitures pour s’en servir illégalement. Et surtout à cause de la totale impuissance de la police à cibler uniquement les malfaiteurs.

Ce que toute personne censée refuserait pour une voiture, elle devrait obligatoirement l’accepter pour les médias ? C’est pourtant exactement ce qui se passe et nous n’en sommes certainement qu’au début. Le pire du pire est de convaincre les clients que tous ces bâtons qu’on leur met dans les roues, c’est pour leur bien.

Moralité : certaines méthodes sont utilisées comme des antibiotiques à large spectre. A pourrir la vie de tous, on espère aussi pourrir la vie des fautifs. On oublie simplement que les fautifs sont plus malins que les antibiotiques ! Résultat de l’opération : on a pourri la vie des innocents.

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