lundi 3 avril 2006

Paris-Dakar: enfin la faim

Chaque année le Dakar se court sur les routes du continent africain. A l'origine ce rallye motorisé partait de Paris et se terminait à Dakar. Actuellement le départ se situe au Portugal, et après avoir traversé l'Espagne, le Maroc, le Sahara Occidental, la Mauritanie, le Mali, et la Guinée, les coureurs arrivent au Sénégal.

Pourquoi le Dakar n'est-il plus une course "de Paris à Dakar" ? Les organisateurs l'ont vite compris: le paysage français ne tient pas la comparaison face aux dunes sous un coucher de soleil saharien. La famille Bidochon ne fait pas vendre du rêve. Une autre raison à ce changement d'itinéraire est que le Dakar défonce tout sur son passage. Il est donc moins dommageable que ce rallye se déroule dans des pays où l'infrastructure routière est quasi inexistante.

Mais le Dakar, c'est avant tout du sport et du rêve. Il n'a pas vocation à faire disparaître la faim dans le monde, mais seulement à la diminuer. Dans les pays traversés, une manne coule dans son sillage, alimentant des régions en argent que seuls le tourisme peut apporter. Les pays se battent pour avoir le Dakar.

Le pire, ce sont les morts. Pas les pilotes qui, eux, ont choisi de prendre des risques, mais bien les enfants qui meurent quasiment chaque année, écrasés par une moto ou par un camion d'assistance. Cette année, deux premiers gosses sont passés sous les roues des voitures ("Décédés dans le sillage de la caravane du rallye" comme le dit si poétiquement la dépêche de l'AFP). Le troisième a été heurté par un camion de manière beaucoup plus brutale.

Le Dakar a-t-il tué de futurs prix Nobel ou brillants avocats ? Ou simplement trois garçons qui aimaient le sport mécanique, qui avaient la vie devant eux et qui sont morts pour permettre à la télévision de continuer à diffuser du rêve à tout prix ? Ne faudrait-il pas stopper définitivement une course qui tue en toute légalité des enfants innocents ?

Le pilote et les copilotes du camion d'assistance concernés ont été entendus par la gendarmerie locale, comme dans "tout accident de la route se produisant au Sénégal", a précisé le directeur de l'épreuve. Comment ce même directeur pourra-t-il annoncer aux parents des victimes qu'il s'agit d'un simple accident de la route !

Lorsqu'un motard australien meurt en course, 1'882 articles sont publiés sur lui. On n'hésite pas à ériger des stèles, à organiser des cérémonies commémoratives, mais jamais on ne remet en question la légitimité d'une telle course.

Moralité: le Dakar est une course qui permet de détruire des paysages et des habitants de régions dans lesquelles la mort est considérée comme un dégât collatéral, d'après les organisateurs.

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