lundi 24 novembre 2008

Merci de penser à l'environnement


Qui n'a jamais vu cette phrase en bas des mails (courriels dans la langue de César; enfin d'Oscar ou de Molière): "Merci de penser à l'environnement avant d'imprimer ce courriel". Elle représente une des plus belles aberrations dont nous pulvérise notre société de zapping à l'esprit Gameboy.

Cela rappelle les publicités pour les médicaments qui annoncent: "Attention! Médicament pas avant dix ans". Ou encore "Tant va la cruche à l'eau" ou bien "Il ne faut pas vendre la peau de l'ours". A force de tout raccourcir et d'imaginer que chacun peut reconstituer les pièces manquantes, la langue perd tout sons sens.

Reprenons la phrase "Merci de penser à l'environnement avant d'imprimer ce courriel". Au premier degré elle signifie "Veuillez imprimer ce courriel, mais, avant, ayez une pensée émue pour l'environnement". Donc vous regardez par la fenêtre et vous vous exclamez "Ah, le bel oiseau" ou bien "C'est vrai qu'il fait frisquet dehors".

Imaginons maintenant une de ces personnes aigries par la somme dérisoire des petites actions demandées à chaque bipède de la planète en comparaison des bon gros scandales environnementaux mettant en jeu des multinationales ou des gouvernements. Cette personne n'aurait sans doute pas pensé à imprimer ce fameux courriel. Mais il se trouve que cette phrase déplacée le lui rappelle. Forcément elle va l'imprimer; et probablement à quelques centaines d'exemplaires, juste pour les distribuer à ses collègues de travail.

Mais le vrai sens de cette phrase incongrue ne serait-il pas celui-ci: "Merci de penser à l'environnement avant d'imprimer ce courriel, et non pas APRES". En effet, chacun sait qu'il est malvenu de penser à la nature après avoir effectué une impression.

Ce comportement soulève deux autres problèmes. Le premier est purement informatique. Toutes ces phrases augmententent la taille des mails et par conséquent le volume de l'information, et donc le temps de transmission. Cela peut être vu comme de la pollution informatique.

Le second problème est plus subtil. Probablement la majorité des gens ne va pas changer radicalement ses habitudes suite à la lecture de cette menace courtoise. L'impression du mail, plus long, aura des chances de gaspiller une page de plus. Mais ce n'est grave, c'est juste l'effet inverse de celui de la phrase d'origine si elle avait été écrite correctement.

Pire, ceux qui l'écrive se fichent certainement des problèmes environnementaux, mais veulent simplement être à la mode, dans le vent, dans le mouvement web 2.0, voire créer un buzz. Ou encore pire, il ont vu cette phrase et se sont dit "Tiens, c'est marrant, je vais m'y mettre".

Pour terminer voici quelques phrases que vous pouvez insérer dans vos mails:

"Merci de penser à éteindre la lumière avant de lire ce courriel."

"Merci de penser au problème de l'eau avant de tirer la chasse suite à la lecture de ce courriel."

"Merci de penser à faire du bien autour de vous avant de lire ce courriel."

"Merci de penser aux problèmes des déchets nucléaires avant d'afficher ce courriel sur votre écran."

"Merci de penser aux SDF qui subissent le froid, avant de parler de nourriture et de chauffage dans vos courriels"

"Merci de penser à tous les gens qui n'ont pas internet avant d'envoyer un courriel"

"Avez-vous vraiment besoin de lire tous vos courriels ?"

Moralité: la connerie, c'est comme un élastique; ça peut grandir, grandir, mais un beau jour, ça pète. La question fondamentale est de savoir si ce jour sera vraiment beau.

Merci de penser aux non-voyants avant de lire cet article!

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